vendredi 23 mars 2012

Maliba

Je n'aurais jamais pu imaginer qu'une nuit je serais réveillée par un ami qui m'envoie un texto me disant "Salut les amis je viens par le présent vous informer que le détonnement des armes se suit actuellement à Bamako par les soldats". Je n'aurais jamais pu imaginer que des gens que je connais, avec qui j'ai vécu, passent une nuit (et surement deux… je n’ai pas de nouvelles de la nuit dernière) à entendre les bruits de combats à l’arme lourde, sûrement des mitraillettes, sous leurs fenêtres. Sous les fenêtres de là où j’ai habité. Qu’ils voient débarquer au petit matin des soldats armés jusqu’aux dents vérifier si le ministre de la Justice ne s’est pas planqué dans le jardin où j’ai passé des heures à bosser et à lire.

            Je connais les lieux, je visualise tout. Je suis passée à Kati devant la caserne des mutins un soir en rentrant d’un concert de reggae. J’ai emprunté la même route qu’eux pour venir à Bamako. Je suis passée devant le palais présidentiel et devant le siège de l’ORTM. Je ne sais pas ce qu’il y a de pire : les savoir là-bas ou être ici. Pourtant je sais que sur place je n’aurais servi à rien et qu’ici je peux appeler et donner les informations que je glane sur Internet. (Ils ont passé la journée enfermés chez eux de crainte d’une balle perdue, sans accès aux informations : personne n’a d’ordi et les soldats ont pillé l’ORTM donc pas de possibilité de voir la télé.) Mais je ne supporte plus d'être ici en sécurité alors qu'eux sont là-bas. Je ne supporte pas d'aller en ville et de constater que la vie continue, que personne n'est préoccupé par ce qu'il se passe là bas. Je sais que c'est normal je ne me suis pas plus préoccupée que ça par ce qui se passait en Syrie; seulement ça fait plus de 24 heures que je vis par procuration à Bamako et que c'est dur de revenir à la réalité française.



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